La belle-mère et sa bru vivaient sous le même toit. Depuis le début, les deux femmes ne pouvaient se supporter. Le mari,
lâche comme la plupart des hommes dans cette situation, se gardait bien de prendre parti.
La vie de la jeune femme était devenue intolérable et elle éprouva une haine sans borne pour son bourreau de belle-mère. Elle résolut de la faire disparaître discrètement et décida donc d'aller consulter une vieille chamane vivant dans une cabane de branches non loin du village. Sans manifester la moindre émotion, la vieille écoute sa funeste demande. Elle ferma les yeux un long moment et répondit enfin : « En matière de poison, il faut être très prudente. Je vais vous donner un mélange d'herbes toxiques qui agissent très lentement. Pour activer leur effet, vous devrez masser votre belle-mère deux fois par jour. Mais pour qu'elle accepte ce traitement, vous verserez tout d'abord cette préparation dans sa nourriture. Elle sera malade quelques jours. Quand le médecin du village l'aura auscultée sans trouver de remède, envoyez-moi chercher. Je donnerai alors la prescription ».
Le plan se déroula comme prévu. La vieille de la montagne fut appelée au chevet de la belle-mère. Elle prescrivit une
tisane et des massages deux fois par jour pour un mois. Elle montra à la jeune femme comment les exécuter.
Par la vertu des massages quotidiens, la belle-mère se détendit et son caractère se bonifia. Les deux femmes se
rapprochèrent, leurs énergies s'harmonisèrent. Au bout de quinze jours, elles étaient devenues comme mère et fille, liées par une véritable affection. La belle-fille fut prise de remords. Elle
courut jusqu'à la cabane de la magicienne pour lui demander un antidote.
La vieille l'accueillit avec un sourire radieux : « Ne vous inquiétez pas ma fille, la tisane est inoffensive. Elle est même bénéfique. Tout s'est déroulé comme je l'avais prévu. La pratique du Tao nous enseigne à transformer le négatif en positif. »
Ce fut comme une révélation pour la jeune femme. A partir de ce jour, elle revint souvent rendre visite à la vieille de
la montagne pour suivre ses traces sur les sentiers de la sagesse. Elle prit ensuite sa succession comme médecin des corps et des âmes, surtout à travers l'art du massage, qu'elle transmit
généreusement. Peut-être est-elle à l'origine de cette jolie habitude familiale en Orient : de masser les uns les autres au quotidien ? Une tradition qui peu à peu voyage vers l'Occident.
Sagesse taoïste, citée par Bernard Bouheret dans
"L'art et la voie du shiatsu familial"
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